Localisation : Vallée de l'Outaouais
Thème : Les Algonquins de l’Outaouais
Année : 1700-1720
Capsule(s) reliée(s) :

1534-1760 - Les Algonquins de l’Outaouais
Capsule
A4
Le choc microbien : la tragédie des peuples autochtones

Un couple d'Algonquins vers 1700-1720.
Un couple d'Algonquins vers 1700-1720.
C.W. Jefferys met en scène un missionnaire jésuite qui tente de convertir les Amérindiens à sa religion.  Cette reconstitution historique permet de comprendre la colère du chef Agwachimagan ou Aouessenipin dit « Le Charbon » lorsqu’il bâme les Robes noires pour les malheurs que ces derniers traînent dans leur sillage jusque dans les villages des Algonquins.
C.W. Jefferys met en scène un missionnaire jésuite qui tente de convertir les Amérindiens à sa religion.  Cette reconstitution historique permet de comprendre la colère du chef Agwachimagan ou Aouessenipin dit « Le Charbon » lorsqu’il bâme les Robes noires pour les malheurs que ces derniers traînent dans leur sillage jusque dans les villages des Algonquins.
Un cas de variole ou « picotte » en janvier 1902.  Cette photographie, prise à Montréal 13 jours après l’éruption de la maladie, nous permet d’imaginer l’enfer variolique vécu par les Amérindiens.  Leur système immunitaire était pris totalement au dépourvu par cette maladie en provenance d’Europe et ils n’avaient pas de remède à cette maladie jusqu’alors inconnue à leurs yeux. Cette dernière était d’autant plus foudroyante et le taux de mortalité d’autant plus important vu cette déficience immunitaire.
Un cas de variole ou « picotte » en janvier 1902.  Cette photographie, prise à Montréal 13 jours après l’éruption de la maladie, nous permet d’imaginer l’enfer variolique vécu par les Amérindiens.  Leur système immunitaire était pris totalement au dépourvu par cette maladie en provenance d’Europe et ils n’avaient pas de remède à cette maladie jusqu’alors inconnue à leurs yeux. Cette dernière était d’autant plus foudroyante et le taux de mortalité d’autant plus important vu cette déficience immunitaire.
Extrait du réquisitoire de l'Algonquin AGWACHIMAGAN dit « Le Charbon » contre la Foi chrétienne
Extrait du réquisitoire de l'Algonquin AGWACHIMAGAN dit « Le Charbon » contre la Foi chrétienne

En plus de faire face aux guerres iroquoises, les communautés « Algoumequines » de la vallée de l’Outaouais rencontrées par Champlain en 1613 sont ravagées, de 1623 à 1650, par  de grandes épidémies.

La première épidémie transmise par des Européens aux populations amérindiennes de la vallée du Saint-Laurent remonte au mois de décembre 1535 ; c’est Jacques Cartier, en effet, qui rapporte le décès mystérieux de 150 Iroquois de la vallée du Saint-Laurent atteints d’une étrange maladie1. Or, ce ne sont que les Amérindiens qui sont touchés, aucun des hommes de Cartier n’étant affectés par cette épidémie.

Les « Algoumequins » de l’Outaouais ne seront pas épargnés par ce choc microbien.  Ils connaîtront des épidémies de petite vérole ou variole (c’est-à-dire, la « picotte »), qui s’avèrera être la plus grande tueuse dans la vallée de l’Outaouais2.  Les Ouechkarinis (Algonquins de la Petite Nation) sont les premiers touchés au cours de l’hiver 1623-16243.  C’est une hécatombe!  Et ils seront à nouveau victime d’épidémies en 1637 et 16394.  On rapporte également qu’ils sont menacés par une famine en 1647 à la suite du déclenchement d’une épizootie5 dans la population de caribous forestiers, ce qui « leur [faisait] vomir du sang par la gueule et [les faisait] raides morts » instantanément6 !   Les caribous forestiers étant une source de nourriture, de vêtements et d’outils essentiels  à la survie des groupes autochtones en hiver, les conséquences furent d’autant plus tragiques. Les Kichesipirinis (la Grande Nation), quant à eux, sont frappés par une épidémie en 1634 et par une famine en 16417 ; c’est un désastre démographique dont les conséquences sont bien décrites par le chef traditionaliste Agwachimagan (Aouessenipin) dit « Le Charbon » en 16438 (audio).

Les épidémies qui s’abattent sur les « Algoumequins » de l’Outaouais et sur leurs voisins et leurs alliés Hurons, Népissingues et Mississagués se conjuguent aux  massacres des Iroquois, pour vider la vallée de l’Outaouais de ses habitants. Ceux qui ne sont pas amenés en captivité dans les bourgades iroquoises de l’actuel État de New York quittent pour s’installer dans des endroits plus sûrs9.  Les Iroquois qui, pour un bref moment, s’accaparent des fourrures de l’Outaouais, ne peuvent toutefois empêcher les Outaouais ou « Cheveux relevés » de l’île Manitoulin et du Lac Supérieur de descendre leurs flottilles de canots remplis de fourrures jusqu’à Montréal, Trois-Rivières et Québec.  Le vide laissé par le départ des Hurons et des Algonquins est comblé par les Outaouais et leurs alliés. La « Grande rivière des Algoumequins » change alors de nom pour devenir la « Rivière des Outaouais 10».

Allez plus loin sur le web!
Voir et écouter un extrait d’une Histoire populaire du Canada concernant, la petite vérole, les autochtones et la Grande paix de Montréal :
Site Web

Références et définitions

1 Ibid, volume 1,  page 28.  Voir également : Jacques Cartier, Relations,  édition Michel Bideaux, Bibliothèque du Nouveau Monde, Presses de l’Université de Montréal, 1986, page 169.

2 Pour une magnifique synthèse des ravages de la variole en Nouvelle-France, voir : Rénald Lessard, Au temps de la petite vérole. La médecine au Canada au XVIIe et XVIIIe siècles, Québec, Septentrion, 2012, pages 27-38.

3 Nelson-Martin Dawson, Op.cit., volume 1, page 172.  Voir aussi : Bruce G. Trigger, Les Indiens, la fourrure et les Blancs.  Français et Amérindiens en Amérique du Nord, Compact No 38, Montréal, Boréal, 1992, page 326.

4 Nelson-Martin Dawson, Op.cit., volume 1, pages 184-185.

5 Défintion : Une épizootie est une maladie frappant, dans une région plus ou moins vaste, une espèce animale ou un groupe d’espèces dans son ensemble.

6 Ibid, volume 1, page 182.

7 Ibid, volume 1, pages 137 et 53.

8 Les Relations des Jésuites, 1642-1644, édition de Reuben Gold Twaites, vol. 26,  pages 300-304. Comme on peut le voir, la graphie e son nom varie considérablement.  Voir : Nelson-Martin Dawson, Op.cit., volume 1, pages 50, 153-154 et 162.

9 Nelson-Martin Dawson, Op.cit., volume 2, pages 408, 411, 418-419 et 424.

10 Louis Taché et al, Le Nord de l’Outaouais, Ottawa, Le Droit, 1938, pages 104-106 et 127-29. Voir également : Courtney C. J. Bond, The Ottawa Country, Ottawa, The Queen’s Printer, 1968, page 13.

Sources et légendes des médias secondaires

PHOTO No 1
Source : Aquarelle anonyme, bibliothèque de la ville de Montréal, salle Gagnon G4592 http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Algonquins.jpg
Légende : Un couple d’Algonquins vers 1700-1720.

PHOTO No 2
Source : C.W. Jefferys, The Picture Gallery of Canadian History, Toronto, The Ryerson Press, volume 1, page 97, reconstitution historique de C.W. Jefferys.
Légende : C.W. Jefferys met en scène un missionnaire jésuite qui tente de convertir les Amérindiens à sa religion.  Cette reconstitution historique permet de comprendre la colère du chef Agwachimagan ou Aouessenipin dit « Le Charbon » lorsqu’il bâme les Robes noires pour les malheurs que ces derniers traînent dans leur sillage jusque dans les villages des Algonquins.

PHOTO No 3
Source : Conseil d’hygiène de la Province de Québec, « Divers spécimens d’éruption variolique », Supplément du Bulletin Sanitaire, février 1902.  Photographe inconnu.
Légende : Un cas de variole ou « picotte » en janvier 1902.  Cette photographie, prise à Montréal 13 jours après l’éruption de la maladie, nous permet d’imaginer l’enfer variolique vécu par les Amérindiens.  Leur système immunitaire était pris totalement au dépourvu par cette maladie en provenance d’Europe et ils n’avaient pas de remède à cette maladie jusqu’alors inconnue à leurs yeux. Cette dernière était d’autant plus foudroyante et le taux de mortalité d’autant plus important vu cette déficience immunitaire.

Texte de l'enregistrement
Extrait du réquisitoire de l’Algonquin AGWACHIMAGAN dit « Le Charbon » contre la Foi chrétienne

J’entends que votre bourg est ébranlé par les discours des robes noires, que plusieurs ont déjà reçu le Baptême, qu’un plus grand nombre le souhaitent, et que vous-même prêtez l’oreille à ces discours qui charment en effet à l’abord…J’ai été parmi les Français à Québec et aux Trois-Rivières; ils m’ont enseigné le fonds de leur doctrine, je n’ignore rien des choses de la Foi : mais plus j’ai approfondi leurs mystères, et moins j’y ai vu le jour.  Ce sont des fables controuvées pour nous donner de véritables craintes d’un feu imaginaire, et sous une fausse espérance d’un bien qui jamais ne nous doit arriver, nous engager dans des malheurs inévitables. Je ne parle pas sans en avoir l’expérience.  Vous avez vu il y a quelques années les Algonquins en si grand nombre que nous étions la terreur de nos ennemis; maintenant nous sommes réduits au néant; les maladies nous ont exterminé, la guerre nous a dépeuplé, la famine nous poursuit en quelque lieu que nous allions.  C’est la Foi qui nous apporte ces malheurs; pour que vous ne doutiez qu’il en soit ainsi, lorsque je descendis il y a deux ans à Québec pour voir où avait abouti la Foi des Montagnais et Algonquins qui avaient reçu le Baptême, on me fit voir une maison remplie de borgnes et de boiteux, d’estropiés et d’aveugles, des squelettes tous décharnés, et de gens qui tous portaient la mort sur leur visage.  Ce sont là les apanages de la Foi, c’est cette Maison qu’ils estiment, (il s’agit de l’hôpital pour les malades bâti près de Québec) ce sont ces gens-là qu’ils caressent, parce que se résoudre à être Chrétien c’est prendre le parti de toutes ces misères. Outre cela, il faut s’attendre de n’être plus heureux, ni à la pêche, ni à la chasse.

Source: Les Relations des Jésuites, 1642-1644, édition de Reuben Gold Twaites, vol. 26, pages 300 à 304.