Localisation : Gatineau
Thème : L’époque du bois équarri
Année : 1836
Capsule(s) reliée(s) :

1760-1867 - L’époque du bois équarri
Capsule
B7
La Guerre des Shiners

Un groupe de « Shiners » prend Jos Montferrand en embuscade, mais celui-ci, rapide comme l’éclair, assomme trois d’entre eux et réussit à s’échapper.
Un groupe de « Shiners » prend Jos Montferrand en embuscade, mais celui-ci, rapide comme l’éclair, assomme trois d’entre eux et réussit à s’échapper.
Le meilleur boxeur de la garnison de Montréal, le major Jones, tourne au ridicule et insulte les Canadiens tout en mettant au défi Jos Montferrand de se mesurer à lui. Montferrand « fait sauter ses habits » et à force de coups de poing bien placés le force à capituler. Voir : Donald MacKay, The Lumberjacks, Toronto, McGraw-Hill Ryerson, 1978, p. 36.
Le meilleur boxeur de la garnison de Montréal, le major Jones, tourne au ridicule et insulte les Canadiens tout en mettant au défi Jos Montferrand de se mesurer à lui. Montferrand « fait sauter ses habits » et à force de coups de poing bien placés le force à capituler. Voir : Donald MacKay, The Lumberjacks, Toronto, McGraw-Hill Ryerson, 1978, p. 36.
Le boxeur Bill Collins s’en prend à Jos Montferrand. Il le bouscule et fracasse son verre en guise d’obligation à se battre. Montferrand le ramasse et en le soulevant au-dessus de sa tête le lance dans le foyer de l’auberge. Les amis du boxeur se portent alors au secours de Bill avant qu’il ne s’enflamme.
Le boxeur Bill Collins s’en prend à Jos Montferrand. Il le bouscule et fracasse son verre en guise d’obligation à se battre. Montferrand le ramasse et en le soulevant au-dessus de sa tête le lance dans le foyer de l’auberge. Les amis du boxeur se portent alors au secours de Bill avant qu’il ne s’enflamme.
De quelques coups de crayon, l’artiste redonne vie à celui qui incarne la force, l’assurance, le courage et la bonté : le personnage légendaire qui fait la fierté du peuple canadien-français.
De quelques coups de crayon, l’artiste redonne vie à celui qui incarne la force, l’assurance, le courage et la bonté : le personnage légendaire qui fait la fierté du peuple canadien-français.

L’une des confrontations à caractère économique qui a fait couler le plus d’encre est sans contredit la Guerre des Shiners1. Il s’agit de la guerre sans merci que livrent alors aux « Canadiens2 » les journaliers irlandais dirigés par Peter Aylen, un ancien marin qui a fait fortune dans le commerce du bois3. Ce dernier devient leur chef en leur promettant de chasser les Canadiens français de cette industrie4. Ces Irlandais, arrivés dans l’Outaouais à l’époque de la construction des canaux militaires, ceux de Carillon, de Grenville et de la rivière Rideau, se retrouvent au chômage à la fin de ces travaux. Ce prolétariat de journaliers, pour la plupart catholiques, se compose d’individus qui n’ont aucune qualification particulière et qui, contrairement aux Canadiens, ont peu d’expérience du travail en forêt5. Les travailleurs irlandais du canal Rideau sont souvent victimes d’accidents de travail et de la fièvre des marais. Ils habitent d’ailleurs un coin d’Ottawa baptisé « Corkstown », sur le bord du canal Rideau, dans des conditions extrêmement misérables6. À la fin de la construction du canal Rideau, en 1832, plusieurs d’entre eux quittent la région. Certains s’installent dans la région de Buckingham avec l’aide de Levi Bigelow qui veut mettre ses terres en valeur pour les vendre plus facilement. D’autres tentent de se tailler une place dans l’industrie du bois, ce qui alimente leur haine des Canadiens français qui occupent plus de 70 % des emplois dans ce secteur d’activité!

En 1835, les « Shiners » se déchaînent. Peter Aylen se met à leur tête et décide de prendre les grands moyens pour « chasser les Canadiens français de la vallée de l’Outaouais afin d’assurer aux Irlandais des emplois et de meilleurs salaires dans les chantiers7 ». Ensemble, ils font régner la terreur sur l’Outaouais et à Bytown, incendiant les commerces et les maisons de ceux qui leur résistent, brutalisant, humiliant et tuant même ceux qui s’opposent à eux. Des trains de bois sont attaqués et confisqués. Les Canadiens français qui les manœuvrent sont chassés et battus. Les entrepreneurs forestiers en viennent à détester les « Shiners » et tous les Irlandais. Les Écossais, plus que toute autre ethnie, se dressent alors en ennemis jurés des Irlandais8.  L’entrepreneur George Hamilton de Hawkesbury s’en prend à ces derniers dans une lettre du 1er juin 1835 :

… ils ont eu recours à des assassins et des brutes soudoyés de la pire espèce afin d’intimider ceux qui ne voulaient que la paix. C’est de cette manière que les choses se passent depuis à peu près trois ans, ce qui a permis d’introduire dans ce coin de pays un certain nombre d’individus, les pires qu’il soit, des Irlandais. Cette année, les troubles ont pris une toute autre allure. Ces assassins et ces bandits ont encouragé la masse des journaliers irlandais à chasser de la vallée tous les travailleurs canadiens de la « Province du Bas » afin que les Irlandais puissent, seuls, fixer des salaires uniformément élevés… Certains entrepreneurs se sont même mis à la tête de ce mouvement… dans l’espoir d’assouvir des jalousies ou des rancunes issues d’un différend sur la question des limites des concessions forestières les opposant aux entrepreneurs qui embauchaient des travailleurs canadiens. Toute cette situation est rendue plus difficile par un certain nombre d’individus sans scrupules, des « squatters »… qui distribuent de la boisson en grandes quantités sur la rivière et qui en font le commerce sans permis9

George Hamilton est enragé contre cette formule primitive d’association syndicale, qui fait croître les salaires de manière artificielle, sans égard aux enjeux et aux règles de l’économie, ce qui menace l’ordre, la justice et la paix sur la frontière.

Les Canadiens français, paisibles de réputation10, décident enfin de se défendre. Ils se donnent un chef et un modèle, Jos Montferrand. Il devient un mythe et une légende grâce aux raclées qu’il administre aux « Shiners11 ». La contre-offensive s’organise, appuyée par les Écossais, les protestants et les classes plus conservatrices de Bytown qui veulent rétablir l’ordre. Peter Aylen sent la soupe chaude. Il quitte alors Bytown et s’installe à Aylmer, où il devient éminemment respectable. La paix revient peu à peu, grâce à la prospérité économique du début des années 1840. Cet épisode de l’histoire de l’Outaouais laisse cependant de profondes cicatrices. L’amertume et les rancœurs pèseront longtemps sur les relations entre les Irlandais et les Canadiens français

Allez plus loin sur le web!
Lire la biographie de Peter Aylen sur le Dictionnaire biographique du Canada :
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Lire le complément d’article sur la Guerre des Schiners dans l’Encyclopédie canadienne en ligne :
Site Web

Références et définitions

1 L’une des explications sur l’origine du nom « Shiners » attribué à ces manœuvres irlandais de l’Outaouais, se rapporte au fait que plusieurs d’entre eux avaient été coupeurs de chêne lors de la construction du canal Rideau. Les Canadiens français les avaient baptisés « chêneurs » dit-on, ce qui, en anglais aurait donné ‘Shiners ». Voir : Donald MacKay, The Lumberjacks, Toronto, McGraw-Hill Ryerson, 1978, p. 28.

2 Au milieu du dix-neuvième siècle, le mot « Canadien » désigne de manière exclusive les Canadiens français.

3 Michael Sean Cross, The Dark Druidical Groves, Université de Toronto, 1968, p. 431.

4 Ibid., p. 432.

5 John H. Taylor, The History of Canadian Cities. Ottawa. An Illustrated History, Toronto, Lorimer, 1986, p. 32.

6 Ibid., p. 32.

7 Michael Sean Cross, op. cit., p. 411 et 424.

8 John H. Taylor, op. cit., p. 34. Également, Lucien Brault, Ottawa, Old and New, Ottawa, Ottawa Historical Information Institute, 1946, p. 66 et suivantes.

9 BANQ -CAQ, E21, 1877, Coupes de bois, 1835, George Hamilton à Lieutenant Colonel Rowan, 1er juin 1835.

10 Cette constatation a été faite par de nombreux spécialistes de la question. Soulignons entre autres la thèse de Michael Sean Cross, op. cit., citée plus haut et en guise d’illustration, une citation du Toronto Globe de 1856 rapporté par ce dernier : « Paddy at home is a slave; abroad, a task master; in fact he must be groaning under a load of chains, real or imaginary, it matters little which, or else he must have a Niggar to wallop. The poor quiet Franco-Canadian, for the time, was Paddy’s Niggar here. » (p.424-425). Voir aussi : Pierre Louis Lapointe, Les Québécois de la bonne entente. Un siècle de relations ethniques et religieuses dans la région de Buckingham, 1850-1950, Éditions du Septentrion, Sillery, 1998, concernant le caractère social des ethnies en présence.

11 Lucien Brault, Hull, 1800-1950, p. 67-68. Également, Michael Sean Cross, op. cit., p. 291-293.

Sources et légendes des médias secondaires

PHOTO No 1
Source : Benjamin Sulte, Histoire de Jos. Montferrand, l’athlète canadien, Montréal, Éditions de Montréal, 1975, p. 85. Illustration d’Henri Julien.
Légende : Un groupe de « Shiners » prend Jos Montferrand en embuscade, mais celui-ci, rapide comme l’éclair, assomme trois d’entre eux et réussit à s’échapper.

PHOTO No 2
Source : Benjamin Sulte, Histoire de Jos. Montferrand, l’athlète canadien, Montréal, Éditions de Montréal, 1975, p. 85. Illustration d’Henri Julien.
Légende : Le meilleur boxeur de la garnison de Montréal, le major Jones, tourne au ridicule et insulte les Canadiens tout en mettant au défi Jos Montferrand de se mesurer à lui. Montferrand « fait sauter ses habits » et à force de coups de poing bien placés le force à capituler. Voir : Donald MacKay, The Lumberjacks, Toronto, McGraw-Hill Ryerson, 1978, p. 36.

PHOTO No 3
Source : Benjamin Sulte, Histoire de Jos. Montferrand, l’athlète canadien, Montréal, Éditions de Montréal, 1975, p. 85. Illustration d’Henri Julien.
Légende : Le boxeur Bill Collins s’en prend à Jos Montferrand. Il le bouscule et fracasse son verre en guise d’obligation à se battre. Montferrand le ramasse et en le soulevant au-dessus de sa tête le lance dans le foyer de l’auberge. Les amis du boxeur se portent alors au secours de Bill avant qu’il ne s’enflamme.

PHOTO No 4
Source : Père Louis Taché et al., Le Nord de l’Outaouais, Ottawa, Le Droit, 1938, p. 142. Illustration d’Henri Julien.
Légende : De quelques coups de crayon, l’artiste redonne vie à celui qui incarne la force, l’assurance, le courage et la bonté : le personnage légendaire qui fait la fierté du peuple canadien-français.